Je vous ai déjà parlé de Jean DOUDET ici dont j’avais retrouvé les origines protestantes non sans mal… Sachez que son père Jacques DOUDET est lui aussi un sacré personnage !
Jacques est donc né et baptisé catholique le 16 novembre 1729 à Pontacq (Pyrénées-Atlantiques). Il est le fils de Jean DOUDET et Elisabeth de BIDOT, tous deux également originaires de la paroisse de Pontacq.
Jacques DOUDET exerce la profession de marchand et se convertit au calvinisme. On ne sait exactement quand s’est opérée la conversion religieuse mais ce que l’on sait en tout cas, c’est qu’il épouse Marie DUPLAA « au désert » le 7 septembre 1771 :
Transcription
L’an mil sept sant septante et un et le septième septembre jay beny le marriage des parties sousnommées saçvoir s[ieur] Jacques Doudet dernier cadet habitant en la ville de Pau, dioceze de Lescar, fils légitime de feu Jean Doudet et de feue dem[oise]lle Elisabeth Bidot d’une part, et de m[ademoise]lle Marie Duplàa, habitante de la ville d’Orthez, dioceze Dax, honnête fille légitime de s[ieu]r Jozué Duplàa et de feue Anne Lacoste d’autre part. Témoin signe sur le registre. Defferre ministre de Jch.
Son plus grand coup d’éclat reste une intervention remarquée dans une affaire qui a fait grand bruit en 1793 à Pau : l’affaire des ossements de la famille de GASSION.
Tentons de résumer l’affaire.
Le 27 septembre 1793, le révolutionnaire SEGUINOTTE est élu maire à Pau. En cette période de grande agitation dans le pays, le nouveau maire ordonne une chose assez extraordinaire : il veut que le tombeau de la famille de GASSION soit ouvert afin de récupérer les cercueils de plomb. Pour quoi faire me demandez-vous ? Hé bien des balles pardi ! Il n’y a pas de petites économies.
Le maire de Pau s’inspire en réalité ce qui se fait déjà à la basilique Saint-Denis en 1792 où les tombeaux royaux sont démontés sur ordre du gouvernement provisoire.
Une fois les onéreux cercueils des GASSION récupérés, il est décidé de jeter les restes dans le Gave, la rivière qui traverse la ville de Pau…
Mais quand il apprend la nouvelle, Jacques DOUDET, « vénérable négociant de la ville de Pau » est révolté par cette profanation du tombeau, fusse-t-il notamment celui d’un persécuteur des protestants… Il demande alors à ce que les restes de la famille de GASSION lui soient remis car il veut lui offrir une sépulture décente.
Le maire SEGUINOTTE tente d’expliquer avec pédagogie à Jacques DOUDET que le Président de GASSION était loin d’être un enfant de cœur et qu’en son temps, il devait même terroriser ses propres ancêtres protestants.
Voilà qui n’est forcément juste puisque Jacques DOUDET avait en fait des ancêtres catholiques, mais passons… 🙂
Il devrait de toute façon se réjouir du sort réservé à l’ancien Président du Parlement de Navarre et à sa famille. Mais au lieu de ça, voici exactement ce que Jacques DOUDET va répondre au maire de Pau :
« S’il a mal fait, celui à qui rien ne peut se cacher l’en a déjà puni depuis longtemps ; mais tous nos ressentiments doivent s’arrêter sur le bord du tombeau ; j’abandonne les cercueils à ta cupidité ; mais j’ai le droit d’exiger les ossements, puisque j’offre de les racheter en payant le prix que tu voudras y mettre. »
Après d’âpres négociations avec le maire et avec le soutien de plusieurs chefs de familles protestantes et de notables non protestants, Jacques DOUDET finit par obtenir gain de cause. Il rachète les ossements de la famille de GASSION et les fait transporter au cimetière de Pau pour leur offrir une nouvelle sépulture. Il ne pouvait définitivement pas se résoudre au fait que des restes humains puissent finir dans les eaux tumultueuses du Gave.
Je vous laisse encore un peu méditer sur ces quelques mots de Jacques DOUDET : « tous nos ressentiments doivent s’arrêter sur le bord du tombeau. »
Et si vous voulez en savoir plus, le récit intégral et sans concessions de cette affaire est disponible dans un ouvrage intitulé « SOUVENIRS HISTORIQUES DU CHÂTEAU DE HENRI IV ET DE SES DÉPENDANCES » de L.T. D’ASFELD . Il est tout simplement savoureux à lire !
2 réflexions sur « Jacques DOUDET et l’affaire des ossements de la famille de GASSION »