De son vrai nom Rolland Maurice Lecavelé, Roland Dorgelès est né le 15 juin 1885 à Amiens. C’est en 1965 qu’il adopte officiellement le nom de Dorgelès sous lequel il s’est fait connaître au cours des décennies précédentes comme écrivain, journaliste et Président de l’Académie Goncourt.
Un prix porte également son nom : le prix Roland-Dorgelès destiné aux journalistes qui « contribuent au rayonnement de la langue française ».
Pour la petite histoire, Dorgelès a choisi ce nom en souvenir des thermes d’Argelès (très probablement Argelès-Gazost dans les Hautes-Pyrénées) où séjournait régulièrement sa mère.
Roland Dorgelès vient d’une famille relativement aisée qui appartient à la petite bourgeoisie d’Amiens, son père est dans le commerce de tissus. Ils déménagent quelques temps après en région parisienne pour les affaires. Les parents ne s’entendent pas et l’enfant préfère se réfugier dans les livres.
Dans Route des Tropiques, il écrit ceci :
Les plus belles heures de mon enfance, je les ai passées avec des livres, le front posé sur mes petits poing brûlants. La dernière page tournée, je ne voulais pas que le roman fût fini et, tout fiévreux encore, je le continuais dans mon esprit, entraînant ses personnages dans de nouvelles aventures où je tenais enfin mon rôle.
Dès 8 ans, il se fait la promesse de devenir écrivain. Son plus beau souvenir d’enfance reste la rencontre avec Jules Verne à Amiens à l’âge de 11 ans. Il fera plusieurs versions de cette rencontre au cours de sa vie mais c’est un épisode qui l’aura profondément marqué.
Quelques années plus tard et pour faire plaisir à ses parents, il étudie l’architecture à l’école des arts décoratifs. Il se lance finalement dans le journalisme en 1904 en travaillant pour des journaux comme Messidor, Paris-Journal, Comoedia, Fantasio, l’Homme libre. C’est en 1907 qu’il adopte le nom de Dorgelès et mène une vie de bohème à Paris.
Sa santé étant chancelante, il se présente à l’appel dans un triste état : malade, déprimé et trahi à l’époque par un ami poète qui lui a volé une conquête féminine. Il se voit déjà mourir dans un sanatorium de la Côte d’Azur où garçons et filles, brûlants de fièvre, se rejoignent la nuit en cachette et s’épuisent de caresses jusqu’à mourir dans un dernier baiser.
Il est donc réformé deux fois. Le 26 octobre 1907, la commission spéciale de Paris le réforme pour « bronchite et réminiscence tuberculeuse (hémoptysie en 1905), diminution très marquée des deux côtés. État général très médiocre. »
Sur les conseils de son médecin, il quitte alors Paris pour la campagne. En réalité, tout le monde le croit mort, mais il finit par revenir de sa convalescence plus vigoureux que jamais.
C’est alors qu’il commence à écrire des pièces de théâtre tout en continuant à collaborer à différents journaux. À l’époque, il compte parmi ses amis Max Jacob, Mac Orlan ou encore Guillaume Apollinaire.
Malgré ses deux réformes, Dorgelès réussit à être engagé volontaire en 1914 avec le soutien de Georges Clémenceau qui dirige le journal L’Homme libre pour lequel il travaille à l’époque.
Il rejoint le 74e Régiment d’Infanterie de ligne de Rouen le 21 août 1914 et combat à Argonne et dans la région de Reims. Il passe ensuite au 39e régiment d’infanterie de ligne, combat notamment au bois du Luxembourg et à la Deuxième bataille d’Artois dans le cimetière de Neuville-Saint-Vaast au cours de l’année 1915.
Il devient pilote, est nommé caporal en 1915 et enfin sergent en 1918. Il est mis en congé en avril 1919 et se retire à Paris. Il sera décoré de la Croix de guerre.
Roland Dorgelès reste comme beaucoup marqué par la guerre, il publie ainsi dans le Canard Enchaîné un texte intitulé La machine à finir la guerre.
Puis, vient son roman Les croix de bois tout droit inspiré de ses années sur le front. Le titre fait référence aux croix plantées au-dessus des cadavres de soldats anonymes que l’auteur a croisées le long des routes.
Le roman loupe de peu le prix Goncourt. En cette année 1919, c’est À l’ombre des jeunes filles en fleur de Marcel Proust qui lui sera préféré mais Dorgelès commence à se faire connaître auprès du grand public.
Les critiques sont excellentes et sa carrière démarre véritablement. Il se marie en 1923 avec Hania (Anette sur l’acte de mariage) Routchine, une artiste d’origine russe. Il commence à voyager un peu partout dans le monde et tire plusieurs écrits des pays qu’il visite. Ses œuvres les plus connues sont souvent marquées par la guerre et les voyages.
En 1929, il devient Président de l’Association des Écrivains Combattants.
En 1954, il est Président de l’Académie Goncourt et le restera jusqu’à sa mort le 18 mars 1973.
Il est enterré au cimetière Saint-Vincent à Paris, derrière lequel, disait-on, il aimait donner rendez-vous aux jeunes filles parisiennes lorsqu’il avait 20 ans.
La nuit avance. Et, doucement, le soir silencieux tisse sa brume, seul grand linceul de toile grise, pour tant de morts qui n’en ont pas.
Roland DORGELES (Les croix de bois)
Sources :
« Roland Dorgelès : Un siècle de vie littéraire française » de Micheline Dupray
Archives Départementales de la Somme
Archives de Paris
https://fr.wikipedia.org/wiki/Roland_Dorgel%C3%A8s
http://www.bookine.net
http://www.terresdecrivains.com
Encore un bien bel article.
Merci beaucoup Murielle !
Excellent article et en plus j’apprends que Dorgelès et mon grand-père maternel étaient dans le même régiment pendant quelques mois en 1915. Merci.
Ha oui ?? Peut-être se sont-ils connus ! Je me pose aussi la question au sujet d’un autre écrivain dont l’article sera publié bientôt et mon grand-oncle paternel. On se met a imaginer leur rencontre parfois 🙂