19 avril 2024

G comme Genève

Genève que je ne vous ferai pas l’affront de présenter, est la ville où a été célébré le mariage de Franz ROSENFELD et d’Anna RADO en 1926. Pour information, jusqu’il y a quelques années, personne dans ma belle-famille n’avait entendu parler d’un quelconque mariage de Franz ROSENFELD (1889-1967).

Comme il est impossible de faire tenir sa biographie en un seul article, je souhaite aborder aujourd’hui la première partie de sa vie déjà bien remplie, avant de poursuivre peut-être dans un second article un peu loin dans ce #challengeAZ.

Les premières années

Photo Franz ROSENFELD
Source : archives personnelles

Franz ROSENFELD est le frère d’Adolf et d’Isidore sur lesquels j’ai déjà écrit. Il est né comme eux à Ovča, cette petite ville serbe située au nord de Belgrade.
Son père Lazar est originaire de Sisak, Sziszek dans l’acte en Hongrois, située au sud-est de Zagreb en Croatie. Sa mère Johanna POLLAK est de Zrenjanin, anciennement Nagy Becskerek, dans la province autonome du Voïvodine.

Naissance ROSENFELD Franz
Naissance de Ferencz (Franz) ROSENFELD le 28/08/1889. Source : Archives de Pancevo, registres juifs, R1889 Pg. 29/30/31, Sg. 150 (Staša Cvetkovic pour Synergia)

Tout ce petit monde était à l’époque hongrois puisque ces territoires étaient intégrés dans le Royaume de Hongrie jusqu’en 1918.

Carte Royaume Hongrie
Groupes ethno-linguistiques du royaume de Hongrie (1910). Source : Wikipédia

Le départ

Alors âgé de 13 ans, Franz se rend à Budapest pour débuter son apprentissage du métier de fourreur. Peut-être était-il accompagné à l’époque de son frère Adolf de deux ans son aîné, aussi fourreur, qui a ensuite exercé dans la ville de Budapest pendant plusieurs décennies. Franz a en effet plusieurs frères.

Photo ROSENFELD
Source : archives personnelles

Franz est donc apprenti à Budapest de 1903 à 1907. Il débute ensuite un petit périple européen qui le mènera jusqu’à Paris. Tous ses déplacements sont révélés dans son dossier de naturalisation suisse.
En janvier 1907, il se rend à Berlin où il travaille comme fourreur pendant toute l’année.
Au cours des premiers mois de l’année 1908, on le trouve au Danemark. J’ai pu retrouver sa trace ainsi que celle de son frère Jacob dans les recensements de la ville de Copenhague. La découverte de ces documents avait fait l’objet d’un article dans le cadre du Tour de France généalogique.
En juillet 1908, il s’installe à Belgique. Il n’y restera deux ans jusqu’à ce que son employeur bruxellois lui demande de se rendre à Paris pour y ouvrir une filiale.

À partir d’août 1913, avec son frère Adolf, il ouvre un atelier au 17 rue Saint-Marc à Paris.

Pour vous donner une idée des pérégrinations qu’il a dû accomplir, très probablement en train et en bateau à l’époque :

Carte deplacements
D’Ovča à Paris. Source : Google maps.

L’internement

Le déclenchement de la Première guerre mondiale anéantit l’ambition des deux frères. La Hongrie étant considérée comme une nation ennemie, ses ressortissants ont le choix entre quitter la France dans les 24h ou rester. Ceux qui décident de rester se font aussitôt arrêter et interner dans des camps de prisonniers. Il y en a plus de 70 en France à l’époque.
Franz est interné dans un camp près de Hennebont, probablement celui de Kerlois.

Il est bien possible que son frère Adolf ait été interné à cette même période, mais j’ignore si c’est dans le même camp de prisonniers. Cette mini-biographie d’Adolphe que j’ai trouvée dans un journal hongrois le laisse entendre.

Biographie Adolf ROSENFELD
Biographie d’Adolf ROSENFELD. Source : Hungaricana

Franz a été « chanceux » si on peut dire. Il tombe malade et parvient à se faire transférer à Arosa en Suisse en octobre 1917. J’ai trouvé ici un document très intéressant sur le sort des internés blessés ou malades sélectionnés pour être transférés dans les pays neutres.
À priori, ce sont les internés tuberculeux qui sont envoyés à Arosa pour une convalescence au grand air. Une fois guéris, ils doivent rapidement travailler dans leur pays d’accueil. J’ai cherché à plusieurs reprises sur le site des Archives historiques du CICR (Comité International de la Croix Rouge) une quelconque trace de Franz ROSENFELD et de ses frères, mais en vain.

L’installation en Suisse

Franz finit par rester en Suisse. Il s’installe à Zürich où il travaille pour l’entreprise de fourrure de Paul Rückmar puis celle de Hänky. En 1922, il finit par ouvrir un atelier à Zürich au Bahnhofplatz 1 et un peu plus tard, en 1928, un autre à Bern.

L’une de ses premières annonces publicitaires en 1923.

Source : Neue Zürcher Zeitung, N° 1625, 25 novembre 1923
ROSENFELD PELZE, Bahnhofplatz 1, Zürich

(En 2018, un terrible incendie ravage ce très bel immeuble qui était alors en pleine rénovation)

Le 2 août 1926 Franz ROSENFELD et Anna RADO se marient donc, non pas à Zürich, mais bien à Genève.
Pour information, j’ai reçu l’acte en question par mail dans les jours qui ont suivi ma demande et après vérification de mon identité.

Mariage ROSENFELD et RADO
Source : Archives d’Etat de Genève

Je ne fondais pas beaucoup d’espoir dans cet acte de mariage mais tout de même il y a des choses toujours intéressantes que je découvre ou qui me sont confirmées.

Premièrement, je n’ai toujours pas connaissance de la date du décès du père de Franz, mais il est possible qu’il soit décédé il y a bien longtemps, probablement avant 1907.
Effectivement, j’ai entre-temps trouvé dans un annuaire hongrois la mention de la mère Johanna POLLAK à Bárányos (Ovča). Elle est dite veuve en 1907 : « ROSENFELD Lázárné Özv. »

Deuxièmement, la mère de Franz est toujours vivante en 1926, et même en 1928 lors de la naturalisation de Franz. Elle est cependant déclarée décédée au remariage de son fils Adolf en 1931. L’intervalle des années se réduit.

Enfin, le témoin de Franz est son frère aîné Philippe et celui d’Anna, François RADO.
Ce dernier est-il de frère ou un autre membre de la famille d’Anna ? Pour l’instant, un mystère persiste autour de l’épouse. Elle est « originaire de Budapest » mais « née en Roumanie » d’un père toujours en vie en 1926 et d’une mère décédée.
À part cet acte de mariage et quelques encarts publicitaires pour l’atelier de Franz à Bern qu’elle tient, je n’ai aucune autre trace d’elle.

La suite, j’espère en tout cas vous la faire découvrir prochainement…

Sources :
Stadtsarchiv Zürich : Dossier de naturalisation de Franz ROSENFELD. Merci à PLL @mascarenhas974.
Synergia
Hungaricana
https://www.ouest-france.fr/bretagne/hennebont-56700/hennebont-en-1914-1918-les-indesirables-internes-kerlois-5865436
https://international-review.icrc.org/

https://www.psp.info/fr/medias/psp/edition-5-mars-2022/comme-le-phenix-qui-renait-de-ses-cendres

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Jourdavant

Généalogiste amateur originaire de l'île de la Réunion

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11 réflexions sur « G comme Genève »

  1. Je me souvenais des frères Rosenfeld, quel parcours des uns et des autres dans une Europe prise dans les tourments

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